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Les cryptomonnaies et leur utilisation quotidienne comme moyen de paiement


Une devise, afin d’être considérée comme telle, doit pouvoir être utilisée dans l'échange de biens et de services. A l’heure des politiques monétaires expansionnistes, dans lesquelles la quantité de monnaie émise augmente continuellement, la fonction de réserve de valeur est fortement remise en question par l’inflation induite de ces politiques. Une des révolutions technologiques de ces dernière années, et dont il a largement été question dans la presse depuis un an, est l’apparition des cryptomonnaies. Sont-elles pour autant en voie de remplacer nos monnaies fiduciaires dans les opérations de paiement et dans leur rôle de réserve de valeur ?

Les cryptomonnaies, un potentiel moyen de paiement offrant de nombreux avantages

Une cryptomonnaie est une monnaie digitale sécurisée de manière cryptographique qui repose sur l’utilisation d’un grand livre de compte répliqué et distribué parmi tous les acteurs du réseau. Ce grand livre s’appelle « Blockchain » et son utilité est de valider et d’enregistrer les transactions, leur conférant sécurité, transparence et immuabilité. Toute transaction réalisée par cryptomonnaie correspond à un transfert de fonds entre deux portefeuilles virtuels, enregistré dans ce grand livre public et justifié par les signatures électroniques cryptées desdits portefeuilles.

La cryptomonnaie est aussi un moyen d’échange entre particuliers sans intervention d’un tiers, et donc, a fortiori, sans intervention de la banque centrale ou de l’état. Une différence majeure entre les cryptomonnaies et les monnaies fiduciaires dites « classiques », est que les premières sont contrôlées directement par les particuliers et sécurisées par des clés privées qui viennent suppléer le rôle tenu par les banques pour les monnaies classiques. Cette désintermédiation est également source d’immuabilité, une transaction en cryptomonnaies, après initiation, ne pouvant être ni bloquée ni modifiée comme cela peut être le cas avec les banques.

Les avantages du paiement en cryptomonnaie sont multiples :

  • L’absence d’intermédiaire. Les Etats, les banques, et les autres intermédiaires financiers n’ont aucun moyen d’influencer une transaction.
  • L’absence de frais de change. Les frais d’une transaction effectuée en cryptomonnaie sont faibles et plus transparents.
  • Il suffit d’avoir un accès internet pour effectuer une transaction – pas besoin de se rendre dans une banque.
  • Il est possible d’effectuer des transactions en toute confidentialité. Par exemple, le Venezuela a annoncé en 2017 la création d’une cryptomonnaie « Pétro », dont la valeur est indexée sur le prix du baril de pétrole. Cette dernière permet au pays de financer son déficit en contournant les restrictions de financement imposées par les Etats-Unis, la notion de confidentialité permettant de convaincre un panel plus large d’investisseurs.

Etat des lieux de l’utilisation actuelle des cryptomonnaies comme moyen de paiement

Aujourd’hui, plus de 100 000 sites internet légaux dans le monde acceptent le bitcoin et d’autres cryptomonnaies comme moyen de paiement. Microsoft fut l’une des premières grandes entreprises à passer le pas en acceptant les paiements en bitcoin (bien que ce ne soit plus le cas depuis Janvier 2018). A noter qu’avec PayPal, il est aussi possible d’approvisionner son compte en bitcoins - il n’est cependant pas encore possible de les utiliser pour réaliser des achats. Showroom privé propose également à ses clients de réaliser des achats en bitcoin et y voit un impact marketing positif.

Cette adoption des cryptomonnaies comme moyen de paiement n’en est cependant pas au même stade selon les régions géographiques, comme l’atteste ci-dessous[1] la répartition des utilisateurs de cryptomonnaies dans le monde (en volume d’échanges journaliers en devises virtuelles) :

D’après Coinmap, une interface visuelle permettant de suivre l’adoption du bitcoin (en volume de transactions) par les sites e-commerce et les magasins physiques, les utilisateurs se concentrent majoritairement en Amérique du Nord, en Europe et en Asie du Sud-Est (Chine, Japon et Indonésie). D’autres régions du monde restent néanmoins très actives avec en tête l’Amérique centrale (Colombie et Venezuela), l’Amérique du Sud (Brésil et Argentine) et l’Afrique (Kenya et Afrique du Sud).

Face à ces enjeux, Sia Partners a rencontré les fondateurs de deux nouveaux entrants visant à démocratiser l’utilisation des cryptomonnaies comme moyen de paiement : Unikeys et PundiX, implantés en Asie.

Unikeys et PundiX fournissent un logiciel de paiement capable d’accepter les transactions en cryptomonnaies. Grâce à leur proposition de valeur, les deux acteurs permettent aux commerçants d’accepter les cryptomonnaies comme moyen de paiement et rendent ainsi accessible l’utilisation des cryptomonnaies dans l’économie légale.

Tous deux proposent également de convertir instantanément la cryptomonnaie en monnaie fiduciaire. C’est d’ailleurs ce qu’ils essayent de faire en proposant un service de trading en ligne intégré au POS (Point-Of-Sale) fourni aux commerçants, réduisant ainsi l’un des freins à l’utilisation des cryptomonnaies comme moyen de paiement. Cependant, pour qu’une monnaie, quelle qu’elle soit, soit stable et conservée, il faut inciter les personnes qui la détiennent à ne pas la convertir systématiquement. Ce travail d’évangélisation, PundiX et Unikeys le font via leur blog, leur participation à des événements autour de la blockchain et de la cryptomonnaie mais aussi via l’organisation de grands événements touchant les jeunes – plus aptes à adopter de nouvelles technologies (« early adopters »).

Quelles actions entreprendre pour une démocratisation effective ?

Deux principaux freins à la démocratisation des cryptomonnaies sont l’absence de régulation d’une part, et le manque de communication et d’évangélisation sur les technologies et les possibles utilisations d’autre part. En conséquence, la plupart des détenteurs de cryptomonnaies œuvrent toujours dans un unique objectif de spéculation.

L’impact de ces deux principaux freins empêche ainsi la réalisation du phénomène du « Chasm », introduit par Geoffrey Moore en 1991. Ce phénomène illustre la démocratisation des technologies en général : le passage des « early adopters » à la « early majority ». Ce passage est essentiel car c’est à ce moment que l’innovation sort de son marché de niche pour rentrer dans le marché de masse.

Quelles sont les conditions du passage des « early adopters » à la « early majority » ? Les « techs enthousiastes » et les « early adopters » sont très sensibles à l’innovation. Pour convaincre la « early majority », il faut lui proposer des valeurs ajoutées :

  • Valeur d’usage, simplicité
  • Qualité de produit, durabilité, fiabilité,
  • Un produit testé (avis favorable des premiers utilisateurs)

Par ailleurs, une réglementation claire, une simplicité dans l’échange et un travail d’évangélisation permettraient de contribuer efficacement au déclenchement du « Chasm » attendu. L’autorité bancaire européenne (EBA) continue d’adresser régulièrement des avertissements sur les risques de pertes en cas d’investissement dans les monnaies virtuelles, ce qui n’est pas pour faciliter le passage à la « early majority ». Cependant, il convient de noter que certaines initiatives commencent à se mettre place, permettant l’émergence progressive d’un cadre qui pourrait à son tour favoriser la confiance puis la démocratisation. En France, on pense notamment à l’article 26 de la loi Pacte sur les ICO autorisant l’AMF à délivrer un visa aux acteurs qui souhaiteraient émettre des jetons destinés au marché français, pour le financement d’un projet ou d’une activité. Cette mesure se couple au « droit au compte spécifique », permettant aux porteurs de projet ayant reçu le label AMF et qui n’auraient pas pu ouvrir un compte bancaire, de faire appel à la Caisse des Dépôts et des Consignation (CDC) pour accélérer le processus.

Pour conclure, la démocratisation des cryptomonnaies comme moyen de paiement n’est pas encore chose faite. Ces dernières ne représentaient en 2017 que 0,03% des transactions effectuées en dollars dans l’e-commerce, et les distributeurs physiques de bitcoins, qui ont vu le jour dès 2016, réclament des frais de retrait toujours très élevés, pouvant atteindre 7 à 8% du montant retiré. Enfin, pour l’instant, moins d’1% des détenteurs de cryptomonnaies utilisent leur portefeuille comme moyen de paiement.

Néanmoins, avec le développement de nombreuses entreprises du secteur des cryptomonnaies, notamment celles ayant effectué une ICO, certaines commencent à payer leurs salariés en cryptoactifs et de plus en plus nombreux sont aussi les commerçants qui acceptent ces cryptoactifs comme moyen de paiement (café, bar et restaurants etc.). Depuis le 1er janvier 2019, en France, il est possible d’acheter des coupons de 50, 100 et 250 euros convertibles en bitcoin ou en Ethers auprès des buralistes, premiers pas vers une démocratisation de l’accès aux cryptomonnaies et vers une potentielle utilisation comme moyen de paiement.

Finalement, pour que les cryptomonnaies soient davantage utilisées comme moyen de paiement, il faudrait :

Une plus grande stabilisation des cours afin de restaurer la confiance des détenteurs de cryptomonnaies – aussi bien l’acheteur que le vendeur. L’investissement dans les cryptomonnaies ne doit plus se faire pour son cours et sa spéculation, mais pour les avantages liés à son utilisation (comme moyen de paiement ou autre).

Un encadrement juridique engageant et clair dans son utilisation, son investissement et son cours.

Une évangélisation toujours croissante de la part d’acteurs traditionnelles (banques) et des nouveaux entrants (dont PundiX et Unikeys).

Sia Partners a rédigé cet article en collaboration avec PundiX et Unikeys et sur la base d’études internes.

[1] Coinmap

Sources


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Author: Christina Simmons

Last Updated: 1702731962

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